Un single prévu début juin, un premier EP bouclé et des labels à démarcher. Les Parisiens de Cheri Cheri Jaguar (le bassiste du groupe est un ami) débutent mais l'épreuve du live a déjà été passée avec brio.
Fraîchement débarqué de New York, parti enregistrer le tout premier EP avec les autres Cheri Cheri Jaguar, au Strange Weather Studio, Alex, le bassiste du groupe semble satisfait mais prévient : "On n'a pas prévu de faire des concerts". Malaise. Deux mois plus tard, le groupe se produit pour la toute première fois sur la scène du Tigre Club, à Paris. Le contraire aurait surpris et déçu, tant les titres destinés à sonner "comme dans une cathédrale, mais sous l'eau", semblent taillés pour l'expérience live. Bruts, saillants et passionnés.
Passionnés, à l'évidence. Un baptême scénique reste souvent délicat à anticiper. Ce gouffre qui sépare l'inconnu de l'instant peut se révéler excitant ou tout aussi bien paralysant. Autant ne pas tenter de tout contrôler et de s'employer comme s'il n'y aura pas de prochaine fois, car rien ne se passera comme voulu. Les quatre membres de Cheri Cheri Jaguar avaient-ils envisagé de remonter sur scène pour un rappel chaudement réclamé par le public ? Non. Se partager une bouteille d'eau à quatre sous une chaleur étouffante ou omettre de donner le nom de leur groupe durant le concert font aussi parti des aléas d'un soir.
Ce sont ses bribes d'impromptu qui font aussi le charme de ce premier live qui en appellent d'autres. Pendant près de 45 minutes, Sacha (voix), Malik (batterie), Arthur (guitare) et Alex (basse) délivrent un set calibré, sans temps mort. Leurs compositions new wave/shoegaze/rock résolument anglophiles brillent par leur immédiateté et leur fougue. Mais le stress est palpable, d'entrée : la cadence rythmique de RIP en ouverture est hasardeuse et le titre expédié, ne laissant ni le temps ni l'opportunité de l'apprécier. Les bases sont néanmoins solides et font mouche sur la plupart des morceaux : des riffs de guitare bien pensés et étincelants, une belle osmose entre la batterie et la basse... Et toujours, ces titres percutants, sans fioriture ni posture à l'image de l'imparable Walk/Don't Walk au chant fiévrieux et rageux et sa superbe architecture sonore. On sent cette volonté de défaire les morceaux de leur cadre spatio-temporel, pour s'élever et frapper longtemps après leur exécution. On pense alors aux divines escapades de New Order et, plus récemment, de DIIV - d'importantes références dans l'ADN de Cheri Cheri Jaguar.
En revanche, on n'aurait pas penser à retrouver un gros tube de la pop des 90's revisité à la sauce rock. Le groupe l'a fait pour nous et déballe Wannabe des Spice Girls. Hommage ? Clin d’œil crypto-post-ironico-moderne ? D'abord surprise, l'audience s'emballe au rythme de cette surprenante reprise, très lointaine de l'originale. Pourquoi pas.
Difficile également de rester indifférent face à la performance offerte par Sacha. Hypnotique et ténébreux, le chant de la caution féminine du groupe frappe par sa singularité, sa profondeur. Et sa férocité digne d'une PJ Harvey, période Rid of Me (1993). A à peine 20 ans, c'est assez couillu et impressionnant. L'interprétation est très en-dedans, habitée voire en état de transe par moments. Une attitude qui tranche avec la réserve affichée entre les morceaux. Il n'y aura pas eu de discours, de blagues, de déclaration d'amour pour les Modern Talking. Mais une honnêteté salutaire et une bravoure à faire valoir leur musique. C'est déjà beaucoup.
Site : http://www.chericherijaguar.com/
Fanpage : https://www.facebook.com/chericherijaguar
-> DJ set le 26/06 au Sans Souci.
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