mardi 7 décembre 2010

Culture pub


Sur disque et encore plus sur scène, Born Ruffians est l'un des groupes les plus passionnants de l'ère moderne. Ils tournent début décembre et c'est immanquable : on vous explique pourquoi.

Ca, c’est le chapô d’un article paru le 26 novembre sur le site des Inrocks. Auteur : Thomas Burgel, fin connaisseur de la scène indé, rédacteur (re)connu pour sa flamboyance mais aussi pour sa main lourde dans le dithyrambe. « Plus » ; « l’un » ; « passionnants » ; « ère moderne » ; immanquable » ; « on » ; « explique » ; « pourquoi ». Y’a pas à dire, Born Ruffians ça allait être chanmé. 

A la lecture de l’article, je me suis dis : « Ah ouais, t’as eu un flair de ouf d’avoir pris ta place pour le concert du 3 décembre à La Maroquinerie (Paris). Pfiou, encore un must see, j’en bande rien que d’y penser ». Les jours suivants, les requêtes pour l’achat de place sur divers forums se multiplient. Là je regarde mon pauvre bout de papier et je me dis « quel flair, quel flair ». Après tout, les Inrocks peuvent pas se tromper. Une rédaction qui classe l’album de Charlotte Gainsbourg devant Merriweather Post Pavilion d’Animal Collective ne peut être qu’un sommet de trustability

Sauf que. En tout objectivité, le concert de Born Ruffians, sans être mauvais, était tout sauf immanquable. Dire que jai raté un épisode de Qui veut épouser mon fils pour ça...


Luke LaLonde, chanteur de Born Ruffians.


Ce post n'est PAS une review du concert (j'aime varier les plaisirs). J’ai passé un bon moment, l’ambiance était au top (note du rédacteur : quand j’évoque l’ambiance et le « c’était sympa hein ? » avant la musique pour parler d’un concert, c’est rarement bon signe), Born Ruffians a des morceaux bien sentis. Rythmiquement, je trouve ça assez audacieux, bien qu’un peu brouillon. Mais surtout, et ça c’est personnel, la voix de Luke LaLonde, aka le chanteur, m’est insupportable à la longue. Criarde, geignarde, ça frôlait le vomitif. Certains kiffent. Moi pas.
En sortant du concert, trois idées me submergèrent : « Guiseppe va-t-il oser la partouze avec ses deux prétendantes plus sa mère aka Marie France ? » ; « Putain demain soir, que regarder : Miss France ou Miss Nationale ? » ; « Les Inrocks ont un souci ».

C’est pas la première fois, mais ce que je reproche aux rédacteurs rock des Inrocks (entre autres – reproches et rédacteurs), c’est leur propension à surestimer des tonnes de groupes sans lendemain. Là, c’est une illustration effarante du phénomène (encore une fois, j’aime bien Born Ruffians, mais « l’un des groupes les plus passionnants de l’ère moderne », for Christ sake not !). Pour info, Burgel n’était pas présent à son « concert immanquable »...
Pour moi, la critique doit permettre de faire le tri, non plus entre le bon et le mauvais (contrairement au sens commun, je ne pense pas que ces notions soient purement subjectives, mais là n’est pas le débat), mais plus à faire découvrir des choses qui méritent de l’être, ou au contraire à pointer les insuffisances d’une œuvre. Ce qui peut aussi susciter l’intérêt.

Là, ça sent la promo à plein nez. Le critique, aussi talentueux soit-il, devient un ersatz, une caricature. Et j’ai l’impression de m’être fait avoir sur la marchandise. Je vous entends : « Ouais bah t’as qu’à pas te fier à la critique ». That’s why ma place était déjà prise avant de lire le papier. J’y serais allé même si l'article était incendiaire. Mais le problème de fond (et qui peut selon moi être généralisable à plein de domaines), c’est qu’on (vous, moi, les mortels, les dieux, les pingouins, whoever). ne parvient plus à faire le tri. Entre le tweet d’un anonyme chinois et une info du New York Times, on ne sait plus à quel saint se vouer. Du coup, ça donne, dans le domaine de la culture : une boulimie de trucs écoutés, de la frustration, des désirs vains, une consommation rapide et inassouvie… Tout ce que je déteste quoi. Tout est bon, il faut tout écouter (« putain mais tu trouves pas que le dernier Kanye West mérite un 10.0 ? T’es trop pas chébran. Hein ? Si je l’ai écouté ? Bah j’ai lu la review de Pitchfork/Slate quoi »). 

Où sont la distinction, le choix, le goût, la hiérarchie, les cœurs battants?

A chacun de se faire son propre avis (critique).

3 commentaires:

  1. N'étant pas au concert de Born Ruffians je ne peux juger, des amies y étaient et le lendemain leurs murs facebookiens s'étoffaient de "Luke Lalonde" et "Born Ruffians" comme une évidence du concert de la veille. A priori la voix du chanteur ne me dérange et pas et j'aime beaucoup leur album.
    Par contre, concernant les inrocks - et la réflexion qui vient ensuite - je suis bien d'accord. (10.0 à l'album de Kanye sérieusement ? même si ses morceaux sont bons, c'est pas l'album de la décennie, ajoute à cela que la moitié de l'album était sortie gratuitement dans ses sessions G.O.O.D Fridays...)
    Les inrocks et autres journaux, (Rock'nFolk présentant les Shades comme la nouvelle étoile rock français, tout comme les BB Brunes (qui ne sont foncièrement pas mauvais, juste très basiques)) ont toujours besoin d'une Une, d'un nouveau truc trop génial qu'il faut qu'on s'arrache, et chaque mois a droit à son album de l'année..

    Bref je m'embourbe dans mon commentaire, tout ça pour dire que les inrocks craquent vite leur slip, tout comme beaucoup de journaux, oubliant un peu de mettre les choses en perspective, ce qui pourtant ferait souvent le plus grand bien...

    Ah et aussi, j'aurai bien aimé les voir quand même.

    RépondreSupprimer
  2. Le but de mon post c'était pas de tailler Born Ruffians (bon, en y repensant, à part la voix c'était vraiment bien putain. je deviens blasé je crois), mais effectivement de dénoncer toute cette critique béate qui ne sert à rien, si ce n'est assurer l'auto-prom des groupes. Malheureusement ça marche pareil en ciné (quoique les critiques assassines ne manquent pas), et en livres c'est encore pire (cf les critiques littéraires des Inrocks et Télérama qui ne sont quasiment jamais négatives because il y a des partenariats avec les maisons d'édition tout ça). Le critique ne prend plus de recul, se doigte à la moindre occasion, et forcément ça pue du cul.

    RépondreSupprimer
  3. C'est ce que j'avais compris ;) et on est d'accord :)

    RépondreSupprimer