jeudi 30 août 2012

#1 Grandaddy, le concert historique



Un trésor caché depuis plusieurs années offre à ses archéologues musicaux une sensation de plénitude, une fois la pierre sous laquelle il se trouvait, ôtée. Plénitude, c'est bien le sentiment qui prévaut lorsque les Californiens reviennent pour limer leurs outils sur la scène de l'Industrie. Quoique la scène de la Cascade leur serait bien allée, aussi, tant le spectacle offert par nos porteurs de chemises à carreaux préférés ont élevé en nous un monument de sentiments en cascade. Il est fort difficile de parler de ce qui nous touche, alors pour ce qui est de ce qui nous met à terre... Les mots sont superflus. L'attente fut longue. Six ans après leur séparation, la tournée de reformation de Grandaddy touche au culte et à l'inespéré. "Notre Daddy, qui êtes aux cieux..." Le concert ne tient pas de l'événement, il vire en trois minutes pliées à l'historique. Sans concession, son brouillard plus que brouillon, instrumentations féroces souvent parfaites, Jason Lytle et sa troupe sont au sommet de leur art. Il n'y a pas que les fans qui sont là : les vedettes adolescentes qui squattent les premiers rangs de la fosse sont venues pour Foster The People, qui se produira sur la scène deux heures plus tard ! Le contraste est saisissant : ces jeunes gens paraissent comme perdus au départ, mais certaines d'entre elles finissent par admettre l'évidence : Grandaddy s'adresse à tout le monde, à tous ceux pour qui la musique n'est pas qu'une question de passe-temps mais bel et bien une question de vie ou de mort. La musique est indispensable à la vie et rend la mort inévitable et moins cruelle. Now It's On, hymne fulgurant, terrasse la folle foule, archi-compacte et dense.
C'est pourtant simple : les plus belles merveilles de Grandaddy sont ici érigées et portées aux nues. Tubes super calibre. Tubes tuent tout. On pourrait à l'envi décrire chirurgicalement chacun des 14 titres interprétés mais ce serait passer à côté de l'essentiel. Le meilleur moment du show fut celui qui marqua la fin de celui-ci. Car une fois le silence revenu, les chansons des Californiens résonnent encore très fort dans nos têtes. Le sourire béat ne nous lâchera pas, et l'envie de les revoir non plus. Cela s'appelle la grâce. Puisque l'architecture est ce qui reste de l'édifice, une fois la pierre ôtée, disait Plotin... Grandaddy a enlevé lui-même le rocher sous lequel il se cachait depuis tant d'années. Il en a fait une formidable comète qui s'envole très loin, partant à la découverte d'une constellation, d'une nouvelle planète, d'une autre forme de vie. Armstrong a marché sur la Lune, mais Jason Lytle a fait un little pas de plus : il a eu le courage de revenir au lieu de nous laisser orphelins. He's simple, he's dumb, he's the pilot : la messe est dite, le titre tire les larmes et les funérailles pilotées par Grandaddy sont une communion de vie et d'amour pour tout ce qui a trait à ce monde cruel, mais quel beau monde quand même. Ce monde qui est nôtre. 

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